Le temps est corrosif..
Intitulé qui peut laisser quelques questionnements. Que veut dire cette phrase?
Corrosif nous vient du latin corrodere, qui se traduit par ronger, racler.
Le temps donc, ronge nos télomères, bout de nos brins d’ADN qui, en mourant, permettent à la vie de se répliquer mais en diminue de facto sa longévité.
Le temps nous ronge l’esprit, au point que nous ne sommes plus capables d’attendre. Il nous faut de l’immédiat. Nous savons que les statistiques sur les longueurs des billets sur internet ne doivent pas dépasser quelques lignes ou quelques minutes de vidéo. Ce sont ainsi des micro-informations sans garantie de véracité qui circulent et nous construisent sur encore plus d’illusion.
Le temps racle nos intestins et ceux-ci deviennent poreux ou encombrés de plaques qui obstruent sa réabsorption. Nous devenons alors malade de cette partie de nous-même qui est tellement importante au point de nous demander lors du salut journalier: « comment allez-vous? ». Pour rappel, cette phrase sous-entend comment allez-vous à la selle? Cette chose si intime est étalée ici, au grand jour. Comme quoi l’ancienne politesse tournait autour de notre extrémité intestinale avec élégance et maintenant que nous nous élevons un peu (soi-disant) nous tournons autour de notre nombril (grâce aux selfies en tout genre) et parfois avec une certaine vulgarité.
Le temps fractionne notre façon de voir en trois termes: passé, présent, futur mais rien n’existe, même pas le présent. Il est aussi fugace que la trace d’une aile d’oiseau dans le ciel. Nous nous accrochons au temps comme la moule sur son rocher, pensant que cela a sens. Le temps, comme le définit E. Klein est un temps que l’on ne peut REpasser. Alors que nous pouvons repasser par un espace, un lieu. Mais est-ce vrai? Le temps étant une construction de l’esprit nous pouvons revivre des événements en « retournant » dans le temps. En fait tout cela n’est qu’une interprétation car en acupuncture il est aisé de démontrer que nous repassons par un temps « passé ».
Marie est anxieuse car elle doit passer des examens importants professionnellement. Elle a de la diarrhée et se sent affaiblie. Cet état est la conséquence d’une construction antérieure dans sa vie. Elle a actuellement mal au ventre. En fait, elle a me dit-elle, le complexe de l’usurpateur. Elle pense que ce qu’elle dit n’est pas la vérité. Cela nous conduit au 17 R Shang Gu qui a la symbolique de « parler faux » en plus d’être le Mo de Manaka de la rate anxiogène. Et puisque le rein a l’émotion « peur », je l’interroge sur des événements passés qui auraient déclenché cette émotion. Il s’agit alors de « revenir » sur cette histoire datée et de trouver le point qui fut bloqué. Le temps est foulé de nouveau avec un autre état d’esprit. Cette chrono-puncture nous permet de circuler librement entre hier et demain entre l’éveil et le sommeil, entrée le rêve et le songe. Tout est vibration et donc lié indubitablement, intriqué car l’unité est partout sous différentes formes .
Le temps se garde en mémoire. Et oui, nous pouvons avec suffisamment de toucher, connaître des histoires inscrites dans la vie des personnes. Mais où est-ce inscrit? Dans le sang qui est comme une pâte à modeler et va garder des « formes » émotionnelles que nous autres, acupuncteurs, interprétons comme étant l’état d’un des douze méridiens. Et cela peut aussi être corrosif car une émotion qui s’imprègne dans le sang devient une nouure, une stagnation qui consumera le sang, c’est la naissance de la maladie. C’est pourquoi la prise de pouls devient un véritable art dont la difficulté se résume au fit de vouloir apprendre vite. Il faut du toucher, du palper, du ressenti. Il faut prendre des pouls, pour n’importe qu’elle raison et vérifier les modifications. Apprendre que nos doigts deviennent des ordinateurs qui enregistrent des sensations, des pressions, des chocs et construisent petit-à-petit une carte de l’humain et de ses souffrances. Le temps ici doit s’abolir en totalité et ne rester que l’être ici et maintenant.
Bon Vent
J.Motte
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